samedi 9 août 2008

1er article

J'ignore ce que je fais là. J'ignore le pourquoi du comment. J'ignore pourquoi le Sénégal. J'ignore pourquoi cette banlieue de Dakar. J'ignore pourquoi j'accepte de me lever à 6 heures du matin, moi la dormeuse invétérée, la marmotte reconnue. J'ignore pourquoi je cours sous un soleil de plomb, à droite, à gauche, à l'infirmerie, dans les dortoirs, pour de l'eau, des feutres, un ballon, un repas. J'ignore pourquoi je subis sans broncher les coupures d'eau et d'électricité, surtout quand elles durent depuis trois jours. J'ignore pourquoi je m'aventure à me laver derrière les dortoirs, à minuit, au seau, en maillot de bain, sans lumière ni attache pour poser mes affaires. J'ignore même pourquoi je ne pipe mot sur les toilettes à la turque.

À moins que...
Ah, oui. J'ai peut-être une idée.

Peut-être cela a-t-il à voir avec le sourire d'Amynata. Ou bien est-ce le regard d'Abdoulaye. Ou bien l'énergie d'Adya. La soif de vivre de Mame Bousso.
Mamadou, Fana, Amy, Marie Jean, Babacar, Ibrahima, Adya, Aïda, Awa, Moussa, Marie Joséphine, Aziz, Yéru, Thomas, Khadi, N'Goné... En tout, ils sont 90. Des orphelins parfois, analphabètes en partie, en grande difficulté sociale et culturelle toujours. Ils viennent de différentes régions du Sénégal. Et une grande partie d'entre eux ne parle pas français.

Que faire pour ces enfants d'Afrique qui voient jour après jour les portes de leur avenir se refermer? Dans quelle mesure la toubab que je suis peut-elle changer les choses? Quelle influence puis-je avoir sur cet enfant qui me supplie d'un regard triste? Comment travailler en binôme, sénégalais et français, main dans la main, pour agir pour ces enfants défavorisés? Comment conseiller, orienter, inspirer, sans sembler dominer, et sans raviver les souvenirs du passé colonial?

D'un sourire édenté, l'enfant balaye les doutes. Peu importe, au fond, le pourquoi du comment. Je suis là pour des raisons peut-être inconnues, peut-être même inconscientes. Je suis là parce que je l'ai voulu, parce que je le veux. Parce que rien ne vaut le sourire édenté d'un enfant.

Oui. Peu importe, au fond, le pourquoi du comment.


Marion

Aucun commentaire: